Peinture, musique, danse, cirque… L’art est au centre d’un concept original de thérapie permettant au patient de s’exprimer sans les mots.
Origine de l’art-thérapie
Il est difficile d’établir avec certitude l’origine de l’art-thérapie. Dès l’Antiquité, l’art est utilisé pour soigner, et son concept en tant que thérapie pourrait être attribué à Aristote. Selon ce philosophe, la représentation théâtrale permettrait aux hommes d’entrer dans un processus de catharsis, c’est-à-dire de se décharger de leurs pulsions, angoisses ou fantasmes en s’identifiant aux personnages du drame.
L’art-thérapie en tant que thérapie n’a fait son apparition qu’au XXe siècle, avec la naissance des centres d’ergothérapie (réhabilitation par l’apprentissage) et de thérapeutique occupationnelle. En 1954, le premier département d’art psychopathologique est ouvert sous l’impulsion de Robert Volmat à la Clinique des maladies mentales et de l’encéphale (Paris). Cette forme d’art-thérapie est celle que l’on qualifie aujourd’hui de traditionnelle.
L’art-thérapie dite moderne s’est développée en France dans les années 1970 à l’initiative du centre de recherches de l’Afratapem. En 1980 est créé le premier diplôme universitaire français à la faculté de médecine de Tours.
Principe de l’art-thérapie
Il existe deux formes d’art-thérapie :
- l’art-thérapie traditionnelle est une psychothérapie à support artistique (spécialité qui complète un premier métier en psychothérapie) ;
- l’art-thérapie moderne est une discipline à part entière assimilée aux autres professions paramédicales officielles.
L’art-thérapie regroupe toutes les disciplines artistiques, les possibilités sont donc variées : modelage en terre, peinture, théâtre, cirque, danse, chant, musique, vidéo, cinéma, écriture, etc. L’art-thérapie à dominante musicale est appelée musicothérapie, celle à dominante danse est appelée danse-thérapie, etc.
L’art-thérapie traditionnelle ou psychothérapie par l’art
Il s’agit d’une méthode de travail en psychothérapie utilisant l’ensemble des outils d’expression artistique dans le but de renouer le dialogue avec soi-même et avec autrui, de stimuler la créativité de chacun. Par l’art, le patient laisse surgir ses émotions, ses souffrances, pour se découvrir et évoluer vers un mieux-être, une résolution ou une meilleure utilisation de ses ressources.
Tout ce que l’individu ne dit pas, l’art – son expression artistique – le dira pour lui. L’art-thérapie ne fait pas appel à une maîtrise technique de l’art, mais à la créativité individuelle fondamentale de chaque être humain. Le but n’est pas de créer un chef-d’œuvre, mais de construire une image valorisante de soi à travers la création artistique. Dans ce contexte thérapeutique, l’art permet aux patients de mieux se comprendre afin de procéder à un changement de l’intérieur.
Aujourd’hui, le titre de praticien en psychothérapie permet de pratiquer l’art-thérapie dans cette orientation.
L’art-thérapie moderne, une discipline sous l’autorité médicale
Cette discipline récente exploite le pouvoir propre de l’art sans aucune interprétation de l’intention, de l’action ou de la production artistique. Elle n’est donc pas une psychothérapie. Elle a vocation à favoriser les capacités expressives et relationnelles des patients. Un protocole thérapeutique est établi ; des stratégies thérapeutiques ainsi que des évaluations pour valider les progrès sont mises en place et réalisées par les professionnels.
L’art-thérapie moderne est sous l’autorité médicale et répond aux règles déontologiques des professions paramédicales officielles. Elle représente aujourd’hui l’essentiel de la pratique de cette discipline.
L’art-thérapeute dans cette orientation est diplômé d’une formation certifiée par l’Etat et d’un diplôme universitaire d’art-thérapeute dispensé par une faculté de médecine (Tours, Grenoble et Lille). Le niveau d’études est le niveau II.
Pourquoi consulter un art-thérapeute ?
L’art-thérapie est particulièrement recommandée pour :
- aider des patients qui s’expriment difficilement par le verbal (adultes, enfants, adolescents) dans les thérapies classiques ou, au contraire, ceux qui ont une parole trop déliée et en excès et peuvent esquiver les vraies difficultés ;
- aider les patients atteints de troubles psychiatriques (schizophrénie, paranoïa…) ou de troubles du lien social (autisme) ;
- reconstruire une image de soi positive, notamment pour les personnes marginalisées ;
- aider les personnes souffrant d’addiction, de la maladie d’Alzheimer ou ayant subi un traumatisme ;
- aider les handicapés mentaux ou moteurs à gérer leurs souffrances ou les douleurs chroniques liées à leur handicap ;
- soulager les personnes atteintes d’une maladie somatique (cancer, sida, sclérose en plaques, AVC) afin d’améliorer leur confiance et leur estime de soi ;
- traiter le stress, les phobies, l’anxiété et leurs manifestations psychosomatiques ;
- se reconstruire après une perte affective ou professionnelle.
Comment pratique-t-on l’art-thérapie ?
L’art-thérapie se pratique en petits groupes ou en séances individuelles, soit en institution médicale ou hospitalière, soit en atelier libéral. Des prises en charge à domicile sont également possibles.
Au cours d’une séance, la production artistique se met au service du patient pour donner libre cours à l’expression de ses souffrances, de ses fantasmes… L’art-thérapeute est là pour accompagner le patient et apporter si nécessaire des techniques. Dans la mesure du possible, il l’aide à donner du sens à ses réalisations artistiques et à trouver des prolongements associant processus créatif et processus thérapeutique.
L’art-thérapeute se doit d’avoir une connaissance et une pratique artistiques personnelles, en synergie avec ses compétences relationnelles et thérapeutiques.
Contre-indications à l’art-thérapie
Il n’y a pas de contre-indications à l’art-thérapie liées au diagnostic. L’art-thérapie est une méthode intégrative, c’est-à-dire qu’elle s’adresse à la globalité de la personnalité individuelle.
Par conséquent, indications et contre-indications se travaillent au cas par cas entre le patient, l’art-thérapeute et les autres professionnels de santé, si la prise en charge se fait au sein d’un réseau médical ou institutionnel. Les contre-indications relèvent du pouvoir de l’art qui, par nature, peut être autant bénéfique que néfaste.
Comment se déroule une séance d’art-thérapie ?
Le déroulement d’une séance d’art-thérapie varie en fonction du type de prise en charge, du patient, de la pathologie et de l’approche art-thérapeutique.
En général, l’art-thérapeute commence par déterminer les motivations du patient et définir avec lui les objectifs thérapeutiques. Il peut lui donner des conseils techniques artistiques, si nécessaire et sur sa demande. Parfois, le patient se lance directement dans une création, sans objectif préalable. Le thérapeute devra alors s’adapter au processus en marche chez le patient. Dans le cas contraire, il proposera une thématique d’expression visant à la fois le processus de création et le processus thérapeutique.
Une séance d’art-thérapie s’organise autour de trois grands points en interaction permanente :
- l’expression, qu’elle soit verbale ou non : apprendre à communiquer avec le thérapeute en séance individuelle et avec les autres participants en ateliers de groupe autour d’une thématique artistique ou s’exprimer par la voie détournée de l’art ;
- la création artistique : organiser et structurer sa pensée, pour créer une œuvre qui ait du sens ;
- la réflexion sur sa création : mettre des mots sur son ressenti, son émotion ;
Le patient est invité à s’appuyer sur la thérapie et l’expérience qu’il en tire pour amorcer un changement dans sa perception de lui-même et dans sa vie.
Comment choisir son art-thérapeute ?
L’art-thérapie est à ce jour une profession non règlementée. Elle est proposée dans un cadre soit libéral, soit institutionnel, médical ou associatif.
Dans un cadre libéral, il est préférable de consulter :
- la guilde des art-thérapeutes, regroupement d’art-thérapeutes professionnels dûment diplômés et respectant le code de déontologie art-thérapeutique ;
- ou l’ (FFAT), organisme fédératif qui œuvre pour la reconnaissance de la profession depuis plus de dix ans. Les art-thérapeutes proposés sont membres de l’association et ont fait l’objet d’une procédure d’accréditation, garantissant leur double qualité artistique et thérapeutique. Ils se sont également engagés à respecter le code de déontologie de la FFAT.
Durée et prix d’une séance d’art-thérapie
Les séances d’art-thérapie durent d’une à deux heures, voire davantage, selon le type de prise en charge (individuelle ou collective), les patients et l’atelier artistique proposé. La périodicité des séances se décide au cas par cas dès le premier rendez-vous.
En atelier/cabinet privé, il faudra compter entre 30 et 70 euros la séance selon la durée, le matériel artistique utilisé et le statut libéral ou salarié de l’art-thérapeute. Le taux horaire moyen constaté chez un art-thérapeute installé à son compte est ainsi de 39 euros, de 21 euros s’il est salarié (chiffres 2011-2012). Les séances ne sont pas remboursées par la Sécurité sociale.
Dans le cadre institutionnel, il peut y avoir gratuité ou bien une participation peut être demandée.
S’informer sur l’art-thérapie
DVD
- “Les multiples visages de l’art-thérapie”, Judy Rubin, diffusé via internet par EMI (Expressive Media Incorporated) : une présentation grand public pour découvrir l’art-thérapie et ses champs d’intervention possibles.
- “Alzheimer : les thérapies non-médicamenteuses”, Eric Ellena et Berna Huebner : huit documentaires à visionner, dont “Je me souviens mieux quand je peins ”.
Livres
- “Créativité et art-thérapie en psychiatrie”, Pierre Moron, Jean Luc Sudres, Guy Roux, éd. Masson : un ouvrage qui synthétise l’histoire, les données cliniques et la mise en place pratique de l’art-thérapie.
- “Tout savoir sur l’art-thérapie”, 7e édition, Richard Forestier, éd. Favre : un livre qui définit les fondements, la méthodologie et l’action thérapeutique de l’art-thérapie moderne.
- “Le grand livre de l’art-thérapie”, Angela Evers, éd. Eyrolles : un ouvrage clair et illustré par de nombreux cas cliniques pour comprendre comment la création devient un outil de transformation et de mieux-être au sein d’une relation thérapeutique.